jeudi 5 mai 2016

La maladie du toc


Le théâtre, nombreux sont ceux qui ne l'aiment pas en raison de ce que Roland Barthes diagnostiquait comme étant «la maladie» du toc. La maladie des tissus d'apparat bon marché, des toiles mal tendues, des verroteries clinquantes. Quelle preuve plus explicite pour attester la diffusion de la maladie et conforter la méfiance généralisée à l'égard du plateau et de ses parures que la devanture somptueuse d'un magasin dans le Marais où, pour décourager toute tentative d'effraction, la propriétaire avait posé une annonce: «ce sont des bijoux de théâtre»? La scène, pour ceux qui n'aiment pas la regarder, cultive le règne de la richesse trompeuse qui ne parvient pas pour autant à tromper. [...] Le toc, le cheap, mais les notions ne se recouvrent pas, leur rejet entretient encore le désamour auprès des gens qui ne fréquentent pas le théâtre en train de se faire mais se réfèrent à son image constituée, transmise, stéréotypée. Depuis, elle a connu des révisions et de radicales mutations. 

J'aime bien cette tentative d'explication du désamour du théâtre par certains. Elle est le fait de Georges Banu dans son petit ouvrage (fort intéressant... après tout c'est l'un des grands penseurs du théâtre) Amour et désamour du théâtre, publié en 2013 chez Actes Sud (dans la série Le temps du théâtre). J'aime la description de cette image qu'ont certains du théâtre, du costume, du décor. Une vision folklorique qui résiste à la contemporanéité. 

Pour ma part, je pense que le toc est aussi un art et derrière le faux et le simulé, il peut  y avoir une véritable recherche esthétique. Le problème du toc, c'est quand il se prend au sérieux (et ça arrive). Tant qu'il se sait théâtral (et non une recherche d'imitation de la réalité), il peut avoir sa raison d'être, avoir une efficacité scénique incroyable...