jeudi 11 avril 2013

Le code du directeur de théâtre...

Ce matin, je dépose sur ce blogue le second chapitre d'un bouquin trouvé sur Google Books au gré de mes recherches... Il s'agit de:


L'un des chapitres les plus amusants concerne les directeurs de théâtre...

DU DIRECTEUR.

Art. 1. Un directeur est roi sur son théâtre.

Art. 2. Tout roi qu'il est, un directeur, n'étant pas inviolable, doit toujours être poli avec ses sujets: plus d'un s'est repenti d'avoir oublié que l'exactitude ne devait pas être sa seule politesse.

Art. 3. Trop de franchise serait nuisible à un directeur. Pour bien administrer un théâtre, il faut être faux, recevoir tout le monde avec grâce, promettre avec l'intention de ne pas tenir, n'en faire jamais qu'à sa tête, et avoir toujours un prétexte plausible à la disposition des réclamants.

Art. 4. Un directeur n'est pas forcé d'être brave; le grand nombre d'inimitiés que l'on s'attire dans cette place le justifie d'avance de tout reproche de faiblesse. On ne peut pas avoir tous les jours l'épée à la main.

Art. 5. Un bon administrateur doit ménager les journalistes. Le quart, au moins, des lecteurs d'un journal en adopte les avis sans réflexions; et ce quart-là porte son argent au bureau comme les trois autres.

Art. 6. Un directeur doit encourager tous les auteurs, même ceux dont les essais font concevoir le moins d'espérances. Racine avait fait Alexandre avant Athalie, et M. Scribe nous avait donné Les Dervis et La Comtesse Stroun avant un Mariage d'inclination et La Dame Blanche.

Art. 7. Un directeur doit revenir le moins possible sur une détermination prise: c'est le moyen de faire respecter ses actes. Que cette nécessité cependant ne l'entraîne pas trop loin, et ne lui fasse pas prendre de l'entêtement pour de la fermeté.

Art. 8. Un directeur doit être galant avec toutes ses pensionnaires, sans montrer de préférence pour aucune. Le peuple comique a la langue pointue, et un directeur a besoin, avant tout, du respect de ses sujets.

Art. 9. Un directeur, s'il est homme de lettres, devra s'abstenir de travailler pour le théâtre qu'il dirige. S'il fait un bon ouvrage, ce qui peut lui arriver comme à un autre, tous les auteurs se ligueront contre lui, crieront à l'injustice, au monopole; et, dussent les recettes de son théâtre en souffrir, il sera bientôt forcé de rayer sa pièce du répertoire s'il ne veut pas succomber sous le poids des réclamations.