mercredi 14 mars 2012

Sur le trac...

Quelques définitions du trac par quelques grands noms du théâtre... tirées du Dictionnaire de la langue du théâtre d'Agnès Pierron. Cette sensation toute aussi grisante que détestable...

Le trac! Mon trac! [...] Chacun a le sien. C'est un phénomène qui n'a rien de commun avec la peur [...] j'ai rarement vu un artiste parvenir à cacher son trac. [...] Le mien me serre, me broie la poitrine; je ne sais plus si mon cœur bat. Il me semble que tout mon corps tremble, et pourtant je n'ai vu que rarement mes mains trembler. Ma tête, mes oreilles bourdonnent; je n'entends plus ce que l'on peut me dire avant mon entrée [...] Je vois tout à travers un nuage. Je m'assieds, je me lève, je ne suis bien dans aucune position; j'allume une cigarette, je la jette après quelques rapides bouffées [...] Au moment d'entrer en scène, je fais faire à tout mon être une sorte de rétablissement. Je suis sur le plateau, je joue et il me semble me dédoubler.
Séverin, L'Homme blanc, 1929

Le «trac» des acteurs (dont certains n'ont jamais pu se défendre) est un adjuvant, une sorte de préparation à l'anesthésie scénique, à l'inspiration pour accueillir la grâce sans laquelle il n'y a pas de grand comédien. C'est de cette grâce dont parlait Mounet-Sully lorsque' un jour, sortant de la scène, il disait: «Ce soir, le dieu n'est pas venu».
Louis Jouvet, Réflexions du comédien, 1938

Le public est un élément dangereux et superbe. Il est un élément au point qu'il donne aux artistes une nausée sournoise: le trac. Le trac est irrésistible comme le mal de mer. Du mal de mer et du trac, beaucoup de marins, beaucoup d'artistes ne guérissent jamais. Et le public ne tient pas plus compte de ce mal qu'il donne que la mer ne s'inquiète de donner le mal de mer.
Jean Cocteau, Le foyer des artistes, 1958

Il y a là tout un monde étrange... Et c'est souvent lorsque nous sommes aux prises avec ces impressions que l'on se dit: «C'est bien la dernière fois que je fais ce truc...».