samedi 4 juillet 2009

«À tour d'rôle»: du cabaret burlesque au spectacle de variétés

Scène de cabaret avec Joséphine Baker et Maurice Chevalier
par Pierre Ambrogiani (1907-1985)

Image tirée du site www.regards-de-provence.org

Je me suis retrouvé, hier soir, assis dans la charmante petite salle du Café-Théâtre Côté-Cour pour assister à l'une des représentations d'À tour d'rôle, un cabaret burlesque conçu par le collectif du même nom composé des trois comédiennes Guylaine Rivard, Vicky et Maud Côté de même que du musicien Michel Otis.

Des comédiennes et du jeu

D'entrée de jeu, il faut saluer la polyvalence de ces actrices qui changent de personnages, de costumes, de style à chacun des numéros... passant facilement (du moins, en apparence!) de l'interprétation scénique traditionnelle, au lypsinc, du mime à la chanson, de la danse à la musique.

Du lot se démarque particulièrement Vicky Côté, rompue au jeu gestuel et aux mimiques expressives qui créent des personnages forts et radicalement opposés l'un de l'autre. De la grue éthérée à la bourgeoise légère, de la vieille dame à la jeune femme coincée sous ses airs naïfs, de la trompettiste à l'enfant en passant par le mime, tous sont remarquablement construits et tenus.

Par ailleurs, les trois femmes (et l'homme!) semblent partager un même plaisir, une symbiose qui se ressent dans les numéros de groupe, notamment celui des trois prostituées de même que celui des Belles-Soeurs... et l'apport de la musique de Michel Otis sert fort bien leur complicité...

Du spectacle et des numéros

Car ce type de spectacle nécessite, pour fonctionner, ce plaisir de la scène, ce dynamisme et ce don de soi qu'elles manifestent.

Pendant près d'une heure trente, les numéros se succèdent avec célérité... En tout, ils seront dix-sept! Et bien que quelques uns de ceux-ci s'étirent un peu en longueur, le ton général réussit à faire sourire et rire.

On pourrait toutefois regretter l'absence ou d'un présentateur ou d'un Emcee pour donner des mises en situations, des contextes, des liens... voire même élaborer une ligne directrice cohérente et centrale... Mais après tout, le but avoué de ce spectacle n'est pas politique ou social. Il s'agit d'un divertissement qui ne se veut qu'être léger et drôle.

Du genre et de l'esthétique

Toutefois, la souplesse de la formule cabaret peut, dans sa richesse et son éventail de possibilités infinies, devenir un peu confuse et désordonnée en réunissant des objets scéniques disparates. En ce sens, le cabaret d'À tour d'rôle n'échappe pas à cette critique et se rapproche ainsi beaucoup plus du spectacle de variétés (qui s'accomode de cet assemblage hétéroclite) tel que compris dans notre nord-américanité... et du burlesque inhérent à ce style...

Mais bon, pour être plus clair, il me faudrait ici faire la différence entre le cabaret (peut-être, après tout, trop pris dans son acception berlinoise) et le spectacle de variétés... chose que je ferai une autre fois...

Dans un autre ordre d'idée, la salle du Côté-Cour se prête bien pour ce type de spectacle: une ambiance feutrée (les éclairages sont de Marilyn Tremblay) et intime, une petite scène décorée simplement de rideaux et garnie d'accessoires, une proximité avec le public... encore là, nécessaire, parce qu'au cabaret, le spectateur est l'objet d'une séduction directe (Dictionnaire encyclopédique du théâtre).

Le public connaît manifestement bien ses interprètes et les aime... ce qui, on peut le comprendre, sème un doute dans l'esprit des néophytes: rit-on toujours des numéros ou si les rires qui fusent ne sont-ils pas plutôt l'objet d'insides où ils ne sont pas conviés?

Toujours est-il que, malgré (et avec!) ces quelques remarques (dues à des exigences qui me sont sans doute très personnelles...), À tour d'rôle offre une soirée agréable et amusante bien venue en ce contexte estival!

À tour d'rôle
Café-Théâtre Côté-Cour
jusqu'au 11 juillet 2009 (du mercredi au samedi), 20h30
20$ (18$ étudiant et travailleur culturel)