lundi 18 août 2008

Le «Clown» nouveau est arrivé!


Ça y est, c'est lancé!

Attendu par un peuple fébrile et vendu d'avance, nouveaux messies théâtraux de ce milieu athée, le Théâtre du Faux Coffre présente enfin, jusqu'au 6 septembre (pensez à réserver... car les places devraient s'envoler rapidement!) Barabbas dans la Passion, les origines du premier clown noir.

Spectacle de transition lente mais certaine vers un théâtre sans les Clowns (après tout, n'ont-ils pas été capturés à la fin de Roméo et Juliette...)? Rentreront-ils bientôt dans le moule?

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Avec Barabbas, les Clowns noirs font, cette fois, selon leurs dires, du vrai théâtre: pas de révolte directe (outre une introduction improvisée), pas de mise en contexte élaborée (outre les consignes d'usage, fort réussies)... et surtout, pas d'histoire mettant en vedette ce quinquet pour le moment quatuor. Les Trac, GrossoModo, Diogène et Piédestal ne sont là qu'acteurs, rien de plus! Aux oubliettes la brigade anti-culture (outre Stephen Harper)! Ils se paient le luxe, maintenant un peu subventionnés, de se faire mettre en scène et d'avoir un régisseur.

Que reste-t-il donc, alors, de l'esprit anarchique de ce groupe hors du commun? Beaucoup... différemment exprimé.

Ce spectacle est composé d'une histoire complète et autonome un peu à l'instar de La Farce de Maître Pathelin. À une (grande!) différence près: cette fois-ci, à part un numéro prophétique, les Clowns n'apparaîtront pas et laisseront toute la place aux personnages de la fiction. Pas d'interruption. Pas de décrochages qui ont contibué à la renommée du Faux Coffre.

Le texte de Martin Giguère ne leur fait pas de cadeau. Le but est manifestement ailleurs. De retour (après Job et Onan) dans une relecture biblique, entremêlant comme lui seul sait le faire les mythes et les événements, campant des personnages plus grands que nature, forts tout autant que fragiles, l'auteur crée une fable évangélico-théâtrale autour de la naissance de leur noir ancêtre dans un contexte christique: la naissance de Barabbas; dans l'intimité de Ponce Pilate; aperçu du songe prophétique de Claudia; les marchands du temple; les noces de Cana; la Passion; les miracles, etc. Bourré de références cultuelles et culturelles qui attiseront de plus en plus le plaisir du spectateur, ce texte (où l'on apprend naïvement que Jésus soupa chez Zachée...) est, en quelque sorte, le principal atout de ce spectacle.

Jérôme Sauvion a, quant à lui, eu pour mission la tâche un peu écrasante, de donner forme à cette matière, de reprendre en main une formule déjà éprouvée et de mettre en scène ce nouvel opus. L'effet obtenu est intéressant... surprenant et intéressant. Une mise en place plus ramassée (qui se bonifiera sans doute avec les représentations) et plus précise (d'autant plus que les Clowns n'ont pas à s'occuper de la technique... ce qui en même temps, brise un peu leur magie...), un jeu plus contrôlé (sur des bases, encore une fois, solides et assurées par chaque acteur), bref, un souffle nouveau. Une fougue apprivoisée... que doivent désormais apprivoiser les principaux intéressés.

D'autant plus que l'espace et la technique se complexifient. Après trois ans de jeu et d'exploitation d'une caisse en bois et de multiples accessoires, place aux décors! Un grand (et superbe) rideau de toile bleu, des praticables empilés recouverts d'une bâche, un carré de sable, une chambre à coucher romaine... et divers effets lumineux. L'imagination ne cède encore rien aux contingences du texte... toutefois, le tout se fait avec une propreté nouvelle, une cohésion d'ensemble, une réflexion passant par le même et unique oeil extérieur qu'était le metteur en scène.

Les performances des acteurs sont toujours à la hauteur et procurent encore et toujours au spectateur des rires, des attentes et une joie sans pareille. Trop en parler, dans ce cas-ci, serait trop en dire... Toujours est-il qu'il y a là une jouissance à les voir se faire succéder les personnages plus tordus les uns que les autres. Parmi eux, Christian Ouellet, le Barabbas originel, tire son épingle du jeu avec une aisance et une chimie qui se marient bien avec ses encombrants compagnons.

Oui, Barabbas dans la Passion marque un tournant (durable?) pour les Clowns noirs. S'effaceront-ils de plus en plus pour laisser un jour la place à leurs alter ego? S'assagiront-ils? À suivre... (À lire aussi, sur le blogue de Joël Martel, Le HD, c'est le théâtre)