vendredi 31 octobre 2008

Quand la vie arrête de tourner autour du théâtre


On fait du théâtre
parce qu'on a l'impression de n'avoir jamais été soi-même
et qu'enfin on va pouvoir l'être.

Louis Jouvet


Mais en dehors du théâtre, est-il une vie ?

Gaston Baty

Depuis un peu plus de deux ans, ma vie ne tourne - presque exclusivement! - qu'autour du théâtre. Mon entourage est spécifiquement théâtral (par défaut), que ce soit à l'UQAC ou pour mes productions; mon travail est théâtral; mes loisirs sont théâtraux (lectures, blogue, sorties, etc.); mes ambitions sont théâtrales de même que mes fluctuations morales... surtout quand vient le moment de faire les demandes de subventions ou pire! de recevoir les réponses. Je suis, en quelques sortes, théâtrocentriste.

J'ai travaillé, au cours de ces deux dernières années avec le Théâtre 100 Masques, les Têtes Heureuses, l'Orchestre Symphonique, ManiGanses, le Théâtre Mic Mac, l'UQAC, le Théâtre Mine de Rien et aussi pour moi-même. J'ai écrit, fait de la mise en scène, des conceptions de toutes sortes, plongé dans des débats, et même joué!

Parfois, je me demande si ce ne serait pas le temps de me retirer ou, plutôt!, comment faire pour attiser une flamme qui vascille parfois, me renouveler... Question qui se fait encore plus précise quand la vie même est victime d'un deus ex machina qui change quelque peu la donne et qui rappelle que hors du théâtre existe aussi un salut... Mon théâtrocentrisme en prend pour son rhume! Le théâtre est-il alors une nécessité ou un accident?

Je me sens donc à l'affût des propositions et des offres pour sortir d'une «routine», terme assez paradoxal étant donné ce statut d'«artiste contractuel» toujours à la course d'un projet à l'autre. Il me faut un nouveau défi - dans le domaine culturel... et théâtral si possible! - pour ne pas sombrer vers une indifférence généralisée...

P.S.: Me relisant, je trouve le ton un peu dépressif... qui est, je tiens à le préciser, inversement proportionnel avec mon état actuel!

jeudi 30 octobre 2008

Le mélo québécois

Tit Coq, de Gratien Gélinas, dictant les lettres qui doivent être écrites
par son frère Jean-Paul Désilet à Marie-Ange (22-31 mai 1948)

Je l'ai déjà dit, j'ai toujours eu un peu de difficulté avec le répertoire dramatique québécois... particulièrement celui des années cinquante (Marcel Dubé, Yves Thériault, Gratien Gélinas, etc.) une bonne partie de celui des années 70 et 80 (plusieurs des Tremblay et des Bouchard, Michel-Marc de son prénom) et un large pan de l'écriture actuelle. Non pas que stylistiquement parlant ou structurellement ce soit mauvais... je ne le pense pas. Seulement, ces pièces finissent toutes - et c'est encore et trop souvent le cas de nos jours - par patauger dans la même fable mélodramatique familiale. À croire que notre dramaturgie (sauf exception) ne s'ouvre pas encore sur le monde...
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Jean-Pierre Ronfard fut (et demeure) un monument dans le paysage théâtral québécois. Expérimentateur, professeur, auteur, metteur en scène, comédien, essayiste, polémiste... Il fut, comme le rappelle Caroline Garand (qui fut chargée de cours à l'UQAC de nombreuses années), un interlocuteur ironique de la communauté théâtrale.

Lu - en souriant - hier soir avant de me coucher, dans Études théâtrales #35 (dossier Jean-Pierre Ronfard: l'expérience théâtrale), où cet homme, en 1989, écrit tout haut (!) ce que plusieurs pensent tout bas:

Il faut que j'exprime ce qui me dégoûte de plus en plus - parce qu'exploité avec indécence - dans la grande tradition du mélo québécois. [...]Le virus du mélo frappe et prolifère, comme il y a vingt-cinq ans le virus brechtien, comme il y a cent ans le virus naturaliste de Zola, comme il y a trois cents ans le virus tragique en alexandrins qui nous a valu une masse impressionnante de navets. Le navet mélodramatique québécois se cultive selon les lois imperturbables qui en font (selon moi) le succès, la niaiserie, l'inutilité, l'ennui.

D'abord le terrain: bien sûr d'abord et avant tout la famille. Mais pas n'importe laquelle. Une famille codée au départ. Père absent, mort ou enfui. Mère abusive: la môman type ou la matante qui s'y substitue. [...] Les enfants: en révolte, bien sûr. [...] Quelques comparses: le voisin qui pelote la mère, la cousine morone, le professeur vicieux qui lorgne la petite fille ou le petit gars (au choix), quelques vieux amoureux transis qui rappellent entre deux crises cardiaques que l'amour c'est beau mais c'est triste. Ghetto familial. Cour des miracles des coeurs et des corps estropiés. Et là-dedans, ça gémit, ça pleure, ça se mouche, ça se masturbe dans les coins, ça jouit honteusement dans la cour arrière.


Et le pire c'est que derrière cette caricature de fin de texte se profile véritablement ce qui compose généralement ce qu'on appelle le théâtre québécois...

mercredi 29 octobre 2008

Qu'est-ce qu'une pièce de théâtre?


Voici le troisième des Douze arguments sur le théâtre tel que définit par Alfred Jarry (dans les Dossiers Acénonètes du collège de 'pataphysique no. 5, 1897), le sulfureux auteur d'Ubu Roi:

3

Qu'est-ce qu'une pièce de théâtre? Une fête civique? Une leçon? Un délassement?

Il semble d'abord qu'une pièce de théâtre soit une fête civique, étant un spectacle offert à des citoyens assemblés. Mais notons qu'il y a plusieurs publics du théâtre, ou tout au moins deux: l'assemblée du petit nombre de intelligents et celle du grand nombre. Pour ce grand nombre, les pièces à spectacle (spectacles de décors et ballets ou d'émotions visibles et accessibles), qui lui sont délassement surtout, leçon peut-être un peu, parce que le souvenir en dure, mais leçon de sentimentalité fausse et d'esthétique fausse, qui sont les seules vraies pour ceux-là, à qui le théâtre du petit nombre semble incompréhensible d'ennui. Cet autre théâtre n'est ni fête pour son public, ni leçon, ni délassement, mais action; l'élite participe à la réalisation de la création d'un de siens, qui voit vivre en soi-même en cette élite l'être créé par soi, plaisir actif qui est le seul plaisir de Dieu et dont la foule civique a la caricature dans l'acte de chair.

Même la foule jouit un peu de ce plaisir de création, toute relativité observée.

Plutôt intéressant cette définition... assez juste (et qui se vérifie toujours de nos jours)... même après plus d'un siècle. Pourrait s'appliquer à la différence entre théâtre populaire et théâtre universitaire...

Chose certaine, il ne faut pas prendre aucun de ces publics pour imbécile. Les opinions de l'un valent bien ceux de l'autre.

mardi 28 octobre 2008

La morale de cette histoire...


La plus belle humilité théâtrale survient lorsque nous devons animer un atelier devant et pour un groupe d'enfants.

Ils sont parfois curieux, spontanés, prêts à tout, enthousiastes... Le travail avance rondement, avec efficacité, dynamisme et plaisir. De véritables petites merveilles surgissent.

Ils sont aussi parfois turbulents et indifférents... et probablement fort influençables par la température. Il arrive que le contact ne peut se faire entre l'animateur et les participants. La période allouée pour l'atelier devient alors pénible et prend les allures d'un combat incessant entre discipline et explications. Le plan de travail devient inutile et rien ne semble accrocher les enfants qui n'en font qu'à leur tête.

Ces jours-là (ou ces soirs, comme hier avec mon groupe du 100 Masques!), nous nous demandons, avec une pointe de découragement et de regret, ce que vaut notre connaissance et questionnons notre capacité à enseigner quelque chose de cohérent.

Puis reviennent les mots de Genêt que je paraphrase ici ne trouvant plus la note originale: on ne peut enseigner le théâtre aux enfants, on ne peut que les enflammer! Et cette maxime résonne alors comme un défi permanent qui permet de poursuivre avec conviction et intérêt cette vocation de transmission.

Que mes petits monstres se le tiennent pour dit!

lundi 27 octobre 2008

PHÈDRE, Acte I scène 3

La Mort de Phèdre a été réalisée
par l'artiste Girodet De Roussy-Trioson Anne-Louis (1767 - 1824)

Voici, pour moi, l'un des plus beaux (et des plus tragiques) passages amoureux du répertoire classique, écrit par Jean Racine et récité par sa douloureuse Phèdre... celui où celle-ci décrit, dans toute sa fureur, tout l'amour qu'elle porte pour son beau-fils Hyppolite:

Mon mal vient de plus loin. A peine au fils d'Egée
Sous les lois de l'hymen je m'étais engagée,
Mon repos, mon bonheur semblait s'être affermi,
Athènes me montra mon superbe ennemi.
Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.
Par des voeux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l'orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée,
D'un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l'encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse,
J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J'offrais tout à ce Dieu que je n'osais nommer.
Je l'évitais partout. O comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
Contre moi-même enfin j'osai me révolter :
J'excitai mon courage à le persécuter.
Pour bannir l'ennemi dont j'étais idolâtre,
J'affectai les chagrins d'une injuste marâtre ;
Je pressai son exil, et mes cris éternels
L'arrachèrent du sein et des bras paternels.
Je respirais OEnone, et depuis son absence,
Mes jours moins agités coulaient dans l'innocence.
Soumise à mon époux, et cachant mes ennuis,
De son fatal hymen je cultivais les fruits.
Vaine précautions ! Cruelle destinée !
Par mon époux lui-même à Trézène amenée,
J'ai revu l'ennemi que j'avais éloigné :
Ma blessure trop vive a aussitôt saigné,
Ce n'est plus une ardeur dans mes veines cachée :
C'est Vénus tout entière à sa proie attachée.
J'ai conçu pour mon crime une juste terreur ;
J'ai pris la vie en haine, et ma flamme en horreur.
Je voulais en mourant prendre soin de ma gloire;
Et dérober au jour une flamme si noire :
Je n'ai pu soutenir tes larmes, tes combats ;
Je t'ai tout avoué ; je ne m'en repens pas,
Pourvu que de ma mort respectant les approches,
Tu ne m'affliges plus par d'injustes reproches,
Et que tes vains secours cessent de rappeler
Un reste de chaleur tout prêt à s'exhaler.

Encore...


Eh bien... c'est reparti... enfin presque!

Radio-Canada vient de confirmer (après les fuites d'hier sur LCN), selon des sources sûres, la tenue d'élections générales provinciales pour le 8 décembre.

Quelle place la culture occupera-t-elle dans celles-ci? Probablement infime, si l'on prend en compte l'imminente crise économique. Au plus, quelques lignes dans les plateformes électorales...

Le choc des générations


Courriel d'un lecteur - ma foi! - assidu que je me permets de placer ici pour l'intérêt du sujet qui me préoccupe beaucoup.

En commentaire aux dernières interventions sur ton blog concernant le colloque et la non-présence ou la quasi-absence des étudiants.

Les événements artistiques ou critiques n'existent que pour ceux que le sujet intéresse; il ne faut pas être naïf.

L'absence d'étudiants ne se justifiera jamais car cela est impossible à justifier... on ne peut forcer l'intérêt; tout au plus peut-on, dans les limites des libertés humaines "fortement conseiller" ou encore créer des événements de groupe où chacun se retrouve "mis en évidence", donc présent par obligation morale.

Deux ou trois étudiants s'intéressent à Tchekhov ?!! Bravo !! Tant mieux !!! Que certains n'aient aucun intérêt dans quoi que ce soit ? Là se trouve la véritable inquiétude, car sans une once d'intérêt on n'a pas un soupçon de culture ou de ce qu'elle représente.


Et puis la relève ? Elle est là, elle arrive, sans doute à mon goût trop polie, et calme, mais sans véritable goût semble-t-il (je peux me tromper) de vraiment foncer dans le tas. Mais il ne faut pas être aveugle, plusieurs travaillent déjà fort et prennent peu-à-peu la place qui leur revient... certaines choses de la vie demandent du temps; c'est comme ça.

Combien y avait-il de jeunes professionnels du théâtre présents vendredi ? Plusieurs parce qu'ils y jouaient un rôle, "celui d'être du colloque" ou de participer à une action artistique... on leur avait appris à comprendre et à apprécier.

Peut-être faudrait commencer à former des spectateurs plutôt que des artistes ? Un baccalauréat en voyeurisme artistique... je sais, trop ironique.

Faut que jeunesse se passe, disait-on à une autre époque pas si lointaine... mais la jeunesse passe vite, très vite, on le sait quand elle est passée et ne survivent dans ces métiers des arts et de la culture que ceux/celles qui déjà apprennent à brûler la chandelle par les deux bouts... c'est déjà bien il me semble.


Merci.

D'un côté, oui, il faut avoir confiance envers ceux qui arrivent... et pourtant, en même temps, il devient si désespérant et/ou décourageant et/ou démobilisant de tenter de les secouer...

 

dimanche 26 octobre 2008

La semaine théâtrale... 12

C'est la dernière semaine pour voir La Cerisaie de Tchekhov (qui, décidément..., est devenue le principal sujet de mon blogue ces derniers temps!) produite par Les Têtes Heureuses. Plus que quatre représentations: jeudi, vendredi et samedi à 20h et dimanche à 14h.

Ce mercredi-ci, soit le 29 novembre, le Théâtre du Saguenay présente une production du Théâtre Voix d'accès: Le dîner de con (objet d'une pièce de théâtre et d'un film dont le succès ne se dément pas...)


Samedi, le 1er novembre, à 13h30, La Rubrique présente, pour les 3 à 7 ans, Le Saut de l'Ange du Théâtre Maât (Belgique). Il en coûte 8.50$ pour tous. Là haut si haut, dans le bleu du bleu, dans la douceur des nues, vivent les anges… Dans la blancheur des cieux apparaissent des plumes rouges, bleu vif, vertes et oranges… dans le silence sonnent les trompettes… Une nouvelle naissance est annoncée. Un petit ange sort d’un ventre de coton… Il n’a pas encore d’ailes. Il ne sait pas encore jouer du violon. Il sait déjà bouger, rebondir et gazouiller. Et il grandit, au bord du monde, au bord du vide. Dans ce vide volent des avions et des oies sauvages et grandissent les envies d’escapade et d’évasion. Mais avant de faire le grand saut, il faudra apprendre à voler de ses propres ailes! Il faudra découvrir ses dons et les exploiter, il faudra apprendre à jouer avec les autres tout en étant soi-même, unique et irremplaçable…

C'est donc là tout ce qui se passera cette semaine... je crois... à moins qu'il y ait autre chose!

samedi 25 octobre 2008

De l'amour et des griffes [journal d'une mise en scène]


Retour en salle de répétitions avec les participants de cette troisième production du Théâtre Mine de Rien de l'UQAC après deux semaines de relâche (cette production, De l'amour et des griffes, est, je le rappelle, un assemblage de deux textes différents: Les Boulingrin de Courteline et Le Défunt de Obaldia).

Revenir à un spectacle après tant de temps requiert un enthousiasme et un plaisir qu'il faut parfois, malheureusement, artificiellement attiser. Non pas que l'équipe soit difficile ou le projet inintéressant... Juste que les paramètres de celui-ci ne correspondent pas à une nécessité de création.

En l'état des choses, et en toute intégrité envers mon engagement premier, à quoi alors puis-je m'accrocher? Principalement à deux choses: la gratification de la transmission, le transfert de la passion théâtrale et l'occasion de préciser une façon de travailler, de diriger les comédiens.

Alors, dans cette veine, les heures allouées cette après-midi ont été consacré à la révision des 6 premières scènes (sur 7) pour trouver, comme l'exige fortement le genre vaudevillesque, le rythme... rythme qui est soutenu par les gestes précis, les dialogues vifs et les déplacements clairement fixés. Une mise en espace essentielle et terriblement nécessaire.

En somme, il s'agit véritablement d'un travail mécanique. D'un échafaudage scénique (à lequel se greffera l'esthétique) duquel devra émerger le personnage.

Il ne reste que quatre semaines de répétitions.

Bref retour sur le colloque des Têtes Heureuses


Une trentaine d'intéressés du théâtre sont venus au colloque des Têtes Heureuses: La vie même (jouer Tchekhov).

Avant d'aller plus loin, quelques mots sur quelque chose qui me tourmente... même si le sujet a été l'objet de quelques billets antérieurement. En fait, pour résumer, une seule question: où sont les étudiants? Aucun étudiant du B.I.A. (outre deux exceptions), aucun étudiant du B.E.A. (outre une exception) et pire, aucun ancien diplômé des récentes cuvées... D.P., dans son blogue Spécial du jour, pose la question de la relève dans son dernier billet (que vous pourrez lire ici). La situation (prise dans un sens plus large) devient plutôt très critique...

Donc, le colloque (en mode résumé, n'ayant pas mes notes avec moi):
  • ouverture avec Jean-Pierre Vidal, le spectateur des Têtes Heureuses depuis toujours, pour parler de La Cerisaie, du principe poétique de Jacobson, de la profondeur de champ, du texte... conférence intelligente à la hauteur de ce professeur émérite;
  • s'ensuit un présentation de Denise Noreau autour du Projet Sakhaline, spectacle de marionnette présenté à Québec (au Lantiss) dans un castelet électronique, dont le sujet est le voyage de Tchekhov vers les bagnes de Sakhalinel. Probablement projet intéressant, malheureusement, il est difficile, sans aucun matériel visuel, de s'en faire une image précise...;
  • passage à la Galerie l'Oeuvre de l'autre pour une performance-théâtrale de Carol Dallaire, artiste invité pour l'exposition organisée dans le cadre de l'événement Tchekhov, mettant en scène, entre les arrangements sonores de Janine Fortin et la voix de Maude Cournoyer, la Lettre d'un personnage à son auteur, La fin des illusions?... un des moments fort de cette journée;
  • retour au Petit Théâtre pour une discussion avec Rodrigue Villeneuve et la distribution portant beaucoup sur le processus de création de cette Cerisaie;
  • intermède musical avec les chanteuses Natalya Thibeault, Caroline Tremblay accompagnée par Céline Perreault nous plongeant, en cinq morceaux, dans le répertoire russe, contemporain (si je ne m'abuse) de Tchekhov;
  • repas dans ce qui est communément appelé l'Aquarium... pour nous éviter (à Hélène Bergeron et à moi) de faire la maintenance d'un repas qui nous coupe ainsi la majeure partie du colloque;
  • reprise en après midi, avec une présentation de Jean-Paul Quéinnec portant sur une oeuvre de Nikita Mikhalkov, Partition pour un piano mécanique, adaptation cinématographique du Platonov de Tchekhov, pour illustrer le mouvement, le découpage séquentiel des oeuvres de cet auteur;
  • arrivée attendue de Mustapha Fahmi qui, dans une vue perpectiviste, lance un débat animé 9et sur une lecture écologique de La Cerisaie;
  • enfin, le dessert, Roland Lepage - auteur (entres autres du monument théâtral québécois Le temps d'une vie et des scénarios de La Ribouldingue), metteur en scène, comédien et ancien directeur artistique du Trident - qui, du haut de ses 80 ans, fait un tour de sa mémoire pour en extirper ses rendez-vous tchékhoviens.
Ces colloques permettent réellement de suspendre le temps, pendant une journée, pour se concentrer, discuter, penser, réfléchir sur un thème particulier... et c'est aussi ça, le théâtre.

vendredi 24 octobre 2008

De retour


Bon, me voici de retour de Québec... enfin, presque. Je me replonge donc dans le monde du théâtre de belle façon ce jourd'hui, en assistant (façon de parler...) au colloque des Têtes Heureuses autour de Tchekhov!

C'est ouvert à tous!

J'en reparlerai dans quelques heures!

lundi 20 octobre 2008

La Cerisaie... ce qu'on en dit

Voici les deux premiers articles parus au sujet de La Cerisaie:

Enchantement de La Cerisaie, blogue de D., Spécial du Jour
La Cerisaie: une troublante similitude avec la réalité, Daniel Côté, Le Quotidien (version incomplète), samedi, 18 octobre 2008.

La Cerisaie d'Anton Tchekhov, production Les Têtes Heureuses
Marie Villeneuve, Christian Ouellet, Sara Moisan
Photographie: Sylvain Dufour, Le Quotidien

La semaine théâtrale... 11


Qu'est-ce qui se passe cette semaine dans le merveilleux monde du théâtre saguenéen...

Mercredi, le 22 octobre, le Théâtre La Rubrique (en collaboration avec le Théâtre du Saguenay) présente Théâtre extrême (une vraie fausse course à la chefferie), une production du Théâtre du Vaisseau d'or (Montréal).

Les Têtes Heureuses présentent La Cerisaie de Tchekhov pour une seconde semaine,du 23 au 26 octobre - soit les jeudi, vendredi et samedi à 20h de même que le dimanche à 14h, au Petit Théâtre de l'UQAC.

Dans la même ordre d'idée (et dans le cadre de l'Événement Tchekhov), les Têtes Heureuses organisent également, le vendredi 24 octobre (à compter de 9h au Petit Théâtre) leur colloque annuel dont le thème est, cette année, Tchekhov: la vie même. L'entrée est libre et permettra d'entendre Messieurs Mustapha Fahmi, Jean-Pierre Vidal, Jean-Paul Quéinnec, Rodrigue Villeneuve, Carol Dallaire, Madame Denise Noreau, les comédiens et les chanteuses Caroline Tremblay et Natalya Thibeault.

samedi 18 octobre 2008

Petit théâtre en papier mâché

Petites vidéos sur le théâtre du Trianon où aimait paraître Marie Antoinette, dernière reine de France... bel exemple du factice et de l'illusionisme de cette fin du XVIIIième siècle.



vendredi 17 octobre 2008

Autour du quatrième créateur


Théâtre pointu, conceptuel, hermétique, pour initiés, pas assez populaire, universitaire, etc.

Je suis de ceux qui croient en l'intelligence du spectateur, en sa capacité de compréhension, d'assimilation des concepts, d'intégration des conventions lors d'une représentation.

L'art n'a pas pour but (du moins je l'espère!) d'abrutir mais plutôt d'élever les âmes.

Il faut savoir faire confiance à cette intelligence - qualifiée de quatrième créateur (après l'auteur, le metteur en scène et l'acteur) par Meyerhold - se méfier du nivellement par le bas dans le but d'atteindre la plus grande masse (il faut aussi, d'ailleurs, savoir éviter le piège de l'hermétisme gratuit...). Le spectateur moyen mérite de se faire considérer comme un interlocuteur ouvert et réceptif. C'est donc à une intelligence développée qu'il faut se référer. Une intelligence collective qui sait suivre, lorsque le projet est sincère et intègre, plusieurs voies. Peut-être est-ce exigeant, je l'admets... mais je crois aussi qu'une telle exigence est un signe de respect envers les spectateurs.

Que tous ne comprennent pas la même chose, mais que chacun comprenne quelque chose... Tel est ce qui importe le plus au théâtre, disait (et dit encore!) Daniel Mesguish. La réception théâtrale peut être quelque chose d'infiniment subjectif et c'est tant mieux. À trop chercher la pensée unique, à trop insister pour imposer une vision, il est risqué de passer à côté de la magie du théâtre, de sa force comme créateur de sens et d'images.

Après le spectacle, il reviendra au spectateur le loisir de réfléchir, de questionner, de (re-)faire sens... et ainsi aussi grandira le théâtre.

Peut-être, qu'à la toute fin, il n'aimera pas... et c'est son droit.

Les merveilles du théâtre médiéval

Il fut un temps où le théâtre simplifiait (!) les changements de décors et de lieux en juxtaposant, les unes aux côtés des autres, des scènes autonomes, des mansions, qui représentaient chacune un de ces lieux... Et comme il s'agissait à l'époque de mystères (ou mistères), à caractère religieux, cette suite de constructions était encadrée par le Paradis à une extrémité et par l'Enfer à l'autre, comme sur ces photos (très connues de quiconque a lu sur l'histoire du théâtre) qui sont devenues le modèle de ce type de spectacle.

Mystère de la Passion
(Valenciennes - 1547)
, miniature d'H. Cailleaux
Des scènes se déroulent simultanément dans (ou devant) telles mansions : tous les spectateurs sont comblés, mais certainement aux dépens de la rigueur du spectacle. Rien à voir, à vrai dire, avec une soirée théâtrale moderne... Dès qu'un peu d'ennui s'installe, on fait donner les Diables ! A chaque fois horrifiques et hilarants, ils sont censés faire tantôt peur, tantôt rire.


La Passion et la Résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ
(Valenciennes - 1547), miniature de H. Cailleau

Nous ne pouvons pas nous fier à ce document pour l'organisation des mansions. Cependant, la présence de personnages réels ou imaginaires donne une bonne idée de la mise en scène simultanée et de la façon dont les acteurs qui ne sont plus "en jeu" restent cependant présents sur scène, parfois en liaison directe avec une mansion (maison). On constate que certaines mansions peuvent être praticables et servent concrètement au jeu des acteurs, au moins le temps de la localisation de ceux-ci. Dieu le Père, ici figuré dans le ciel (à l'extrême gauche), est néanmoins un personnage du drame.
Le mystère durait de 6 à 25 jours, autour de Noël, de Pâques et aussi de la Pentecôte. Pour incarner les quelques 200 personnages (parfois 500), une centaine d'acteurs est nécessaire. sans compter les figurants. Aucune unité de lieu, de temps ou d'action. On parcourt allègrement les années ou les siècles. De même que le drame liturgique reflétait l'Art Roman, de même le Mystère reflète l'Art Gothique : surchargé, bourgeonnant dans tous les sens.

jeudi 16 octobre 2008

Le mot de Cambronne


Et c'est parti pour trois semaines!
Que Tchekhov se le tienne pour dit.
MERDE À TOUTE L'ÉQUIPE!


mercredi 15 octobre 2008

Les générales...


Ce matin, je viens de terminer de peindre (et pour la cinquième fois!) l'aire de jeu en orange. Peut-être faut il remettre cent fois l'ouvrage sur le métier... n'empêche que cette fois, le dit ouvrage commence à m'entrer dans le corps... d'autant plus qu'il me reste encore une couche de vernis à donner cet après-midi. En tout, j'aurai passer une vingtaine d'heures avec un rouleau à la main.

Entretemps, nous compilons les invitations pour la première bénéfice tout en essayant de boucler la soirée du 18 octobre avec efficacité... de même que le colloque du 24 octobre 2008.

À un peu moins de huit heures avant la générale de La Cerisaie, nous sommes encore et toujours au Petit Théâtre de l'UQAC à courir après des ombres qui nous filent entre les doigts. D'ailleurs, qu'est-ce qu'une générale?

Couturière On appelle la couturière l’avant-dernière répétition d’une pièce de théâtre, celle précédant la générale. Le nom vient du fait qu’elle permettait aux couturières de faire les dernières retouches aux costumes. (Cette expression n'est guère employée dans le milieu saguenéen.)

Générale technique

Filage de la pièce pour vérifier la technique (son, image, vidéo, changements de décors). Elle peut se faire en temps réel... ou en accéléré entre deux «cues», d'où le nom si poétique de «cue-to-cue».

Générale

C'est un raccourci de l'expression "répétition générale". La
générale est l'ultime répétition avant la première représentation publique. Elle se fait dans la salle des représentations, en costume, avec les accessoires et les décors, les lumières... Les spectateurs sont des invités. Les critiques dramatiques venaient autrefois lors de cette répétition générale afin de pouvoir faire publier leur article dès les premières représentations. À présent ce n'est plus le cas, et les théâtres organisent souvent pour les journalistes une représentation spéciale que l'on appelle « générale de presse ». Celle-ci peut avoir lieu plusieurs représentations après la première.

Avant-première Au théâtre, une avant-première, parfois, à tort, abrégée en première, est un événement promotionnel consistant à jouer une pièce de théâtre avant la « première », c'est à dire avant le début officiel de l'exploitation commerciale auprès du public.

mardi 14 octobre 2008

L'auteur - moi en l'occurence - ne peut écrire sur le théâtre aujourd'hui, le théâtre aspirant parfois ses artisans dans une intense activité (tant physique que moral). Les dossiers s'accumulent alors que les échéances arrivent chaque jour un peu plus vite. De retour demain.

dimanche 12 octobre 2008

La semaine théâtrale... 10


L'événement de la semaine à venir est le début des représentations de La Cerisaie de Tchekhov, présentée par les Têtes Heureuses.

Le tout se passe au Petit Théâtre de l'UQAC, à compter du 16 octobre 2008 (jusqu'au 2 novembre) - les jeudis, vendredis et samedis à 20h et les dimanches à 14h. Notez que ce samedi-ci, il s'agit de la première officielle (transformée, pour l'occasion, en soirée bénéfice à 50$ le billet).

C'est tout.

samedi 11 octobre 2008

Les principes fondamentaux de la biomécanique de Meyerhold


Petite synthèse brève et concise sur un élément historique du théâtre meyerholdien, la biomécanique - qui, en soit, se révèle être un entraînement de l'acteur et non pas un style de jeu -, les mouvements conscients sur scène:

Il y a tout d'abord l'OTKAZ (le refus) qui prépare l'action.

Puis vient le POSSYL (l'envoi) qui est la réalisation de l'action.

Suit le TOTCHKA (le point) qui représente l'atteinte du but de l'action.

Tout ceci étant réalisé sur le TORMAZ (le frein), la retenue physique et émotionnelle qui permettra de réagir immédiatement à tout obstacle imprévu pouvant se présenter.

Voilà. En d'autres termes, et pour faire encore plus simple, c'est l'intention, l'élan, la pose et le retour au point neutre.

Cocteau et le théâtre


À la longue, le théâtre où je travaille ne perd pas son prestige. Je le respecte. Il m'intimide. Il me fascine. Je m'y dédouble. Je l'habite et je deviens l'enfant que le tribunal du contrôle autorise à entrer aux Enfers.

Jean Cocteau, La difficulté d'être

vendredi 10 octobre 2008

I.L. aimait bien mettre en scène de petits drames

Drame à Bareback Mountain: la chasse au cocodrille hermaphrodite.
(avec l'aimable autorisation de Carol Dallaire)
Photographie: Carol Dallaire

Comment sortir des murs du Petit Théâtre alors que tout m'y appelle (parfois avec empressement!) ces jours-ci? De toute façon, pourquoi en sortir (même si 10 000 raisons pourraient m'y pousser...)?

Le Pavillon des arts est un microcosme effervescent. Et, outre le théâtre et les théâtreux, la Galerie l'Oeuvre de l'Autre se joint à l'ébullition ambiante en présentant l'exposition de Carol Dallaire Histoires discrètes [quelques fêlures] accompagnées de I.L. aimait bien mettre en scène de petits drames (objet d'une magnifique publication).

Cette partie d'exposition est composée de véritables mises en scène, à l'échelle miniature, de jouets d'enfant. Une poésie du passé ludique. Une métaphore des enjeux contemporains. Les Petits Drames jouent sur les simples rapports entretenus entre le spectateur et l'oeuvre, entre le lointain et le rapproché, entre l'attendu et la surprise. Marcel Duchamp avançait la notion d'inframince, un mot qu'il disait humain et affectif, non une mesure précise scientifique, pour parler de ce qui se donne à voir, quand on observe, entre le dessus et le dessous des choses, entre le dit et le non-dit [...]. (Carol Dallaire, quatrième de couverture de la publication)

Le questionnement se dessine sur le visage du visiteur aussitôt mué en spectateur devant l'élaboration des constructions scéniques. Puis, peu à peu, le sourire apparaît à la lecture des titres, petites oeuvres en soit.

Un pouvoir de suggestion puissant duquel le théâtre devrait parfois apprendre! Une théâtralité d'une simplicité désarmante et pourtant, forte et efficace...

D'ailleurs, Patrice Pavis - sémiologue français du théâtre (?) - définit ainsi la théâtralité: c'est le théâtre comme quand nous étions enfants...

Quoi rajouter de plus?

jeudi 9 octobre 2008

Malaise


Je vis un certain malaise ces temps-ci... et c'est celui d'être inclus dans une distribution et de passer pour un comédien (je parle ici de La Cerisaie des Têtes Heureuses).

Bien sûr, techniquement, je suis sur scène... par conséquent, je suis comédien. Mais l'épithète ne me va pas. N'est pas comédien qui veut (d'où ce que l'on peut appeler le professionalisme). Il faut un plaisir du théâtre que je n'ai pas. Il faut une rigueur au théâtre que je n'ai pas - du moins pour jouer. Il faut un talent que je n'ai pas. On ne peut tout faire et tout ne peut être fait par n'importe qui.

Je suis très près d'eux lorsque je fais de la mise en scène ou que j'écris. Pourtant, la ligne entre faire et voir faire est infranchissable... pour le moment.

mercredi 8 octobre 2008

Du sable dans l'engrenage


Oui, les Têtes Heureuses présentaient hier leur conférence de presse pour la tenue des leurs activités automnales... et ce sujet s'est retrouvé dans un billet précédent, dans lequel je mentionnais, entres autres, qu'il y fut question de la situation financière (et organisationnelle) de la compagnie, aux prises avec une coupe drastique du CALQ.

Voici que, ce matin, paraît, sous la plume de Christiane Laforge, un article dans le Quotidien, La belle folie des Têtes Heureuses... dont ce petit bout: Oser présenter en région un théâtre dont le coût de production s'avère au-dessus de leurs moyens financiers, à moins d'y consacrer la presque totalité de leur budget, optant pour une administration bénévole, telle est la méthode «heureuse». Apprenant, plus tard, que le CALQ reconsidérait à la baisse sa contribution pour 2008 et 2009, une réduction de 25% de sa subvention passant de 50 000$ à 37 000$, la compagnie a refusé la suggestion de ne pas produire ce Tchekhov.

Le problème des Têtes Heureuses se situent exactement là. Artistiquement, l'évaluation est élogieuse (bien que l'organisme soit un peu catalogué dans le théâtre universitaire... encore une fois, perçu comme une tare...). Toutefois, ce choix d'assumer un budget presque exclusivement dédié aux frais directs de production au détriment d'une structure (peut-être, somme tout, plus efficace...) organisationnelle cadre, malheureusement, fort mal dans un programme voué au fonctionnement - ce qui rend la coupure encore plus tragique vu la certaine cohérence qui s'y rattache.

Plus qu'un problème de perception, il s'agit véritablement du questionnement d'une façon de faire... conjuguée à un calcul statistique défavorable.

La mise en place d'une organisation permanente peut-elle nuire à la création? La liberté de l'artiste souffre-t-elle nécessairement dans une structure plus définie? Faut-il, aujourd'hui, ne faire du théâtre que dans un cadre imposé? Telles sont les questions qui se posent désormais pour cette compagnie qui porte pourtant une impressionnante feuille de route.

«La belle folie des Têtes Heureuses» se mue parfois en dur coup.

mardi 7 octobre 2008

Esthétique théâtrale

Honoré Daumier (1808-1878)
Les fruits d'une mauvaise éducation dramatique



(CORVIN Michel, Dictionnaire encyclopédique du théâtre, Larousse, Paris, 1998)

Après que l'expression ait été utilisée à maintes reprises ces derniers jours (et dans ce blogue), je me permets un petit détour dans l'ouvrage de référence citée ci-haut:

Le mot esthétique apparaît en Allemagne en 1750 et ne devient d'un usage courant qu'entre 1800 et 1850. Il désigne la science, ou plus modestement, la réflexion, qui porte sur la beauté des oeuvres d'art.

[...] Dès lors, deux directions s'offrent à la réflexion sur le beau. Il y a une esthétique normative et une esthétique simplement descriptive. La première donne des règles qu'elle prétend universelle. Un coup d'oeil sur l'histoire suffit pourtant à montrer que ces règles ne sont considérées comme valides que dans un temps et un milieu déterminés, et en outre qu'elles sont plus l'expression d'un goût que d'une nécessité objective. [...] Le beau n'est ni démontrable, ni immuable.

L'esthétique descriptive, pour des raisons différentes, n'a pas davantage réussi à s'imposer, pas plus au théâtre que dans les autres arts. Certes, elle est plurielle, elle offre une variété de descriptions des formes. On pourrait, dans l'esthétique théâtrale, en suivant les grandes époques de l'histoire du théâtre ou des aires géographiques suffisamment contrastées, établir une série de monographies dont chacune aurait sa cohérence. (1) [...] Somme toute, il n'y a pas une esthétique théâtrale, il y en a nécessairement plusieurs. Aucun principe d'organisation qui serait commun è à ces divers sous-systèmes ne semble apparaître. L'ensemble des esthétiques théâtrales n'est pas comparable à celui des corps chimiques, qui est cohérent, même s'il est ou a été incomplet.

L'originalité de chaque esthétique semble irréductible. Irrémédiablement enchaînée au concret, l'esthétique théâtrale a en fait renoncé à dépasser les frontières de l'histoire et a tenu le plus grand compte, en cherchant sa propre définition, des techniques ou des idéologies avec lesquelles elle est contrainte de travailler. Elle apporte plus ou moins nettement selon les cas, sa couleur propre à l'architecture du bâtiment théâtral, à la dramaturgie, à la mise en scène, à la pratique du comédien, aux décors, aux costumes, aux éclairages, aux effets sonores, etc. Elle ne peut pas ne pas intégrer non plus, dans la mesure où son public les attend, de vastes paysages historiques, une morale, au moins implicite, et même une métaphysique. La combinaison de tous ces éléments acquiert nécessairement un sens .

Par cette approche, l'ensemble des esthétiques théâtrales tend à progresser vers ce qui est peut-être le rêve de la science théâtrale universelle, cette histoire totalisante du théâtre, cette Theaterwissenschaft. L'emploi de l'expression "esthétique théâtrale" au singulier ne dénoterait alors que l'aspiration à l'impérialisme culturel chez chacun des sous-systèmes qui prétendent à cette domination.


Peut-être ce billet demande-t-il une nuit de sommeil...

(1) Il y aurait, par exemple, et la liste est loin d'être exhaustive, une esthétique shakespearienne qu'on appelerait peut-être baroque, une esthétique classique ou pompeuse, niée et prolongée `ala fois par une esthétique romantique, une réaliste, une symboliste, une brechtienne, une de l'absurde, une du quotidien, etc.

Tra la la la la lère

Non... ce n'est pas du théâtre... mais tout de même! Quelle belle mise en scène infographique d'une musique!

Conférence de presse

Les Têtes Heureuses ont tenu leur conférence de presse annuelle pour faire état de leur programmation à venir.

Il y fut question, bien entendu, de La Cerisaie de Tchekhov qui mettra en scène treize comédiens (pour dire vrai, il s'agit plutôt de douze acteurs et de moi!). En quelques mots, le directeur artistique résume: Ce que j'écris, c'est la vie disait Tchekhov... Seul vaut la peine la transmission de l'intransmissible, répondait Blanchot. Et voilà le programme établi sur la ligne ténue du théâtre.

Il y fut également question du colloque attenant à ce spectacle... colloque - ou plutôt rencontre - qui s'articulera, cette année, autour du thème La vie même et qui - par des conférences, tables rondes, entrevues, projections, etc. - essaiera non pas de répondre mais de réfléchir à diverses questions (et bien d'autres): de quelle dramaturgie avons-nous besoin maintenant? pourquoi la scène contemporaine semble-t-elle avoir du mal à rendre compte du politique et du métaphysique et à inventer un nouveau réalisme? comment jouer ce théâtre encore si stupéfiant formellement? Il s'agit d'une activité ouverte à tous, et très enrichissante qui vaut le coup...

Il y fut aussi question, en troisième lieu, de l'exposition qui prend place présentement dans la Galerie L'Oeuvre de l'autre, Histoires discrètes (quelques fêlures) de Carol Dallaire, qui fait écho à la pièce de Tchekhov par les thèmes, les images, les répliques traités par l'artiste. Le tout sera assorti d'une publication et d'un vernissage, demain soir (avec un magnifique buffet!).

Enfin, comment ne pas s'attarder un instant sur la situation financière des Têtes Heureuses, affligées d'une coupure drastique du CALQ... Cette partie serait longue à élaborer... un jour, pourtant, il faudra que je m'y astreigne...

lundi 6 octobre 2008

dimanche 5 octobre 2008

La mise en scène de la dernière minute


Les fins de production (et les demandes de subventions, et les activités connexes) ne semblent pouvoir se boucler qu'à la dernière minute, peu importe le temps passé à les réfléchir, à les organiser, à les planifier... Symptômes ou conséquences?

L'implication demande un redoublement d'ardeur malgré les échéances qui deviennent de véritables épées de Damoclès et les tensions qui surgissent de toutes parts.

Le théâtre est grand lorsqu'il fait monter la foule à lui ou, s'il ne la fait pas monter, alors au moins l'attire vers les hauteurs, disait Meyerhold. Si cette maxime vaut pour les spectateurs, elle vaut également pour une équipe de création (ou de production, ou de direction, ou d'administration). Si, par manque de temps ou de structure, on la perd de vue, il en résulte un manque de stimulation néfaste, un trou noir dans une passion souffrante, la vacuité.

Dernier sprint pour des coureurs de marathon.

La semaine théâtrale... 9


Eh bien... à ma connaissance, ce sera encore une semaine relativement pauvre en sorties, si ce n'est de la conférence de presse des Têtes Heureuses, ce mardi, à 9h30, au Petit Théâtre de l'UQAC... et le vernissage, ce mercredi-ci, de l'exposition Histoires discrètes (quelques fêlures) de Carol Dallaire, présentée dans le cadre de l'Événement Tchekhov.

Bien sûr, d'ici là, tous planchent probablement sur la demande du Conseil des Arts du Saguenay, répètent et/ou se préparent à recevoir des spectacles...

Voilà.

samedi 4 octobre 2008

Suite au billet de ce matin pour lequel je me dois de remercier Carol Dallaire...


Les oeuvres d'art se divisent en deux catégories :
celles qui me plaisent
et celles qui ne me plaisent pas.
Je ne connais aucun autre critère.

Anton Tchekhov

Intégrité double?


Il y avait longtemps que je n'avais parlé de la critique... En fait, je n'en parlerai pas encore ce matin. Du moins, que de façon détournée...

À être trop encensés de tout bord tout côté, à trop demeurer sur la frontière de la convenance (quand les qualificatifs ne sont pas amplifiés), les egos des artisans deviennent démesurés et, dès lors, le moindre questionnement prend des allure d'attaque en règle... Le risque est grand pour l'évolution de la pratique lorsque plus personne n'ose sortir du c'est bien... ou du bravo...

C'est dans ce contexte qu'entre en jeu l'intégrité... cette intégrité du praticien qui se forge à partir de celle du critique... et vice versa.

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Petit échange entre André Brassard et Wajdi Mouawad (Je suis le méchant!, Léméac, 2002, p. 60):

André Brassard: Il m'arrive de dire C'est bien ou C'est pas pire. Je me rends des fois à Très bien mais je refuse d'aller plus loin. Quand on me dit: Ah! C'est extraordinaire!, je réponds Oui, c'est intéressant, mais il y a un problème ici... Sinon on n'apprend plus rien.

Wajdi Mouawad
: Bukowski disait: Quand tu crois que t'es bon, quand on te dit que t'es bon, t'es mort.

André Brassard
: Moi, je le dis autrement: quand tu crois que t'es bon quand on te dit que t'en bon, tu vas être obligé de croire que t'es mauvais quand on va te dire que tu es mauvais.

vendredi 3 octobre 2008

Désillusion... ou l'envers de la médaille


Il y a les systèmes de conventions réalistes (et/ou cohérentes) qui régissent tout - plateau, jeu, mouvement, lumière, etc. Assez cartésien comme établissement...

Et il y a les systèmes disons utilitaires (entrées, sorties, positions scéniques) qui servent le bon déroulement du spectacle.

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Petite histoire racontée par Radu Penciulescu, directeur du Conservatoire de Suède de Malmoë (dans Le livre des exercices, de Patrick Pezin, p.364):

Il y avait un ténor d'opéra qui n'était pas l'homme le plus intelligent du monde, qui chantait dans Aïda le rôle d'un général qui allait à la guerre. Les soldats faisaient le choeur et chantaient: On va à la guerre, vite, vite! pendant une demie-heure. Quand finalement ils arrivent à partir, ce ténor, lui, part du côté opposé des soldats. Le public rit et applaudit. Le metteur en scène parle ensuite au ténor et lui demande: Mais tu es idiot, pourquoi tu pars comme ça? C'est de ce côté-là! Le ténor répond: Mais le public sait bien qu'il n'y a pas la guerre, que je ne suis pas un général; pourquoi faire semblant que je vais à la guerre, alors que ma loge est de ce côté-là?
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Personnellement, je trouve la dernière réplique du ténor plutôt sensée...

jeudi 2 octobre 2008

Les Têtes Heureuses présentent


Les communiqués doivent pleuvoir dans les bureaux de rédaction ces temps-ci... Qu'à cela ne tienne. Voici celui qui vient des Têtes Heureuses (accompagné de l'affiche de Patrick Simard):

Les Têtes Heureuses présentent La Cerisaie d’Anton Tchékhov, du 16 octobre au 2 novembre, au Petit Théâtre du Pavillon des arts de l’Université.

La Cerisaie est créée à Moscou en janvier 1904. Tchékhov meurt quelques mois plus tard. On se rend compte aujourd’hui que tout le théâtre du XXe siècle était en germe dans cette pièce, et aussi toutes les tragédies politiques et morales qui allaient déchirer le monde contemporain. Il n’y a pas de chef-d’œuvre plus proche de nous que la Cerisaie. Sa tendresse, son implacable lucidité, son comique se mélangent apparemment sans règles, comme dans la vie : « Ce que j’écris, c’est la vie » s’obstinait à répéter Tchékhov à ceux qui le transformaient en « pleureuse ».

Le drame : la vente d’une immense propriété, la Cerisaie, qui est la Russie d’avant la Révolution, le paradis de l’enfance, la beauté et le raffinement. Tout un monde y grouille (12 personnages) autour d’une femme, Lioubov, la propriétaire qui rentre d’un séjour de 5 ans à Paris. Devra-t-on vendre vraiment ? Et qu’est-ce qui nous attend après la catastrophe appréhendée ?

Jour cette pièce est en soi un défi de taille. Le faire ici est un événement. Treize comédiens professionnels du Saguenay ont été réunis autour du metteur en scène Rodrigue Villeneuve et d’une solide équipe de concepteurs. Leur objectif ? Pouvoir dire, chacun : « Ce que je joue, c’est la vie. ».

Il s’agit donc d’un rendez-vous rare, que la vie culturelle, si menacée soit-elle, peut seule offrir. Les Têtes Heureuses souhaitent qu’on y réponde nombreux, assez pour en montrer la nécessité.

mercredi 1 octobre 2008

Вишнёвый сад

Dans l'attente de celle des Têtes Heureuses, voici La Cerisaie... en russe. L'ouverture de l'Acte I:



Voici un extrait qui devrait être tiré du troisième acte... soit pendant la longue scène entre Trofimov et Lioubov... soit après que la Cerisaie fut vendue...:

Le 1er octobre



Pour les organismes théâtraux subventionnés au projet (ou qui aimeraient l'être!) au Conseil des Arts et Lettres du Québec (mieux connu sous le très bref et très claquant sigle C.A.L.Q.), c'est aujourd'hui la date limite pour le dépôt d'une demande. L'entretien de l'espoir.

C'est donc un sprint final pour boucler le dossier.

S'emmêlent donc la présentation et le profil du demandeur, la définition de projet incluant un bref résumé, un échéancier, la démarche artisitique de l'artiste associé au projet, la cohérence du projet en rapport avec la mission de l'organisme, etc. Les chiffres dansent et valsent sur la grille... Et il finit toujours par manquer un article de presse, une photo ou autre truc du genre.

Toujours est-il que si, avant 16h, l'envoi peut prendre la route postale (le cachet de la poste faisant foi, comme toujours...), ne restera plus que l'attente (l'interminable attente de 5 mois) avant la réponse.

Croisons-nous les doigts. Prochaine échéance: Conseil des Arts du Saguenay (programme pour le fonctionnement des organismes artistiques), mardi, le 6 octobre 2008... Décidément, ça ne lâche pas!